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L'urgente authenticité africaine: Le temps de l’accomplissement






Au G20 de juillet 2017, Emmanuel Macron a trouvé que le problème de l’Afrique est un ‘’problème civilisationnel’’. Je ne sais pas moi, ce que Monsieur le président a voulu dire, mais je sais qu’il manque (peut-être exprès) une partie de l’histoire des civilisations et de l’humanité. Mais ce qui est flagrant, c’est qu’il occulte de notre histoire sa partie glorieuse, le véritable hier africain, est oublié au profit de l’aujourd’hui qui, faisant office de l’éternel hier dans leur esprit, fait aussi miroir de l’éternel demain… La dernière partie de ma série de texte sur l’urgence de l’authenticité africaine ne pouvait pas trouver meilleure illustration que la question du journaliste à monsieur le président, à la réponse de ce dernier au premier (Mdr… qui est dernier qui est premier, c’est fou comme on est envahi par la concurrence).  

Bon, je vais être clair, notre hier, ce n’est  pas un hier de misère et d’aliénation… ce n’est pas une histoire de déportation et de commerce encore moins de malédiction qui aurait rendu notre peau noire… Mais qui croit encore ces clichés aujourd’hui, en tout pas moi, le dégaoutisé du sage pharaon dégoutiseur. En tout cas pas moi.

            Écoutez, nous avons eu, pendant tout le processus scolaire, le moral et le savoir formaté par une certaine conviction que l'histoire de notre civilisation commence à l'arrivée du colon. Mdr, quel mensonge ! Tant que nous nous situerons à ce moment de notre histoire, tout nous semblera impossible dans cette lutte civilisationnelle, puisque nous nous sentirons comme des bébés du colon... Notre aujourd’hui dépendant en grande partie de notre Hier. Je parle tant de la relation cause-effet, mais aussi, de notre encrage idéologique. Si nous décidons de limiter notre souvenir commun, notre hier à la barrière mensongère de Champollion et ses élèves, bha, nous construirons comme c’est peut-être déjà le cas, un aujourd’hui d’échec, d’aliénation de main tendue et de ventres affamés.

Si nous revenons à la strophe extraite du Livre des Morts des Anciens Egyptiens que nous utilisons, nous y lisons : « Voici qu’aujourd’hui je crée les Demains ». Le symbolisme est fort. Voici (sous mes yeux, sous nos yeux de manière visible est palpable) que, le moment est arrivé pour moi de créer (acte de création et peut-être de procréation mais non d’invention) les (et non des) Demains (pour lesquels je suis hier). Je reprends, c’est une invitation, à la création, dans le temps présent des Demains. L’interpellation est urgente et la réaction nécessaire. Toute action que nous posons doit créer les Demains. C’est une grande responsabilité qui nous incombe ainsi dans notre vie pour et par la communauté. Les pères de l’indépendance (les vrais, c’est-à-dire ce qui se sont vraiment battus en sa faveur) avaient bien compris cette nécessité de créer des Demains conformes à l’Hier. Dans son discours digne d’un cours magistral, à Paris en 1982, Sékou Touré, Président Guinéen de l’époque, affirmait avec fierté à la face du monde que « nous sommes d’une démocratie très évoluée »[1]. Je ne sais pas si Jacques Chirac qui l’avait invité et qui était alors Maire de Paris, avait compris la portée d’une telle affirmation, mais pour moi, c’est comme un appel à la valorisation des pratiques culturelles africaines, qui malgré leurs imperfections (choses communes à toutes les œuvres humaines) sont de loin, à bien des égards, supérieures aux normes en vigueur meshui. Mais Pour Sékou Touré, le moment appelait une telle assertion pour justifier que la Guinée d’alors était en parfaite symbiose avec son lit historique. Et c’est bien à cette symbiose que nous invite le texte antique égyptien. A faire coïncider l’histoire avec elle-même, à harmoniser ses trois moments (hier, aujourd’hui et demain) en tenant dans les mailles, le même élan spirituel, ontologique et culturel qui, se métamorphosant pour s’adapter aux réalités du protéiforme « Aujourd’hui », reste foncièrement et substantiellement constant. 


Statuette Khéops

Si je me focalise sur la théorie héraclitéenne et nietzschéenne de l'éternel retour, et m'inspirant des révélations de Diop, je dirai que l'Afrique a toutes les chances de ressurgir... De reproduire son passé glorieux pharaonique... Que des "Khéops" (ou Chéops)[2] ont toujours existé et existe encore aujourd'hui... mais le problème, c'est qu'ils ne savent pas, qu'ils sont de grands bâtisseurs... et le véritable combat, n'est pas de vouloir égaler le blanc, mais de faire prendre conscience aux nôtres, que nous sommes capables de choses qui ont prouvé pendant plus de 7 millénaires, le pouvoir authentiquement africain, et que cette vérité de notre être qui luit sur le sommet des pyramides égyptiennes et qui dort dans le sarcophage de Toutankhamon, doit être retrouvée et alors... nous serons nous-mêmes, non pas vis à vis des autres, mais vis à vis de nous-mêmes. Créer les Demains dans ce sens seraient de faire coïncider les africains avec leur véritable histoire, surmonter le mal de l’aliénation culturelle et tuer le complexe d’infériorité. A partir du moment où ce pas-là sera franchi, les actions que nous mènerons pour la réalisons de nous-mêmes pourrons voir le jour parce que nous aurons enfin pris conscience en nous-mêmes et nous seront plus forts que jamais.



Félix Houphouët Boigny, premier président ivoirien, disait en 1980 qu’« il faut nourrir votre enfant jusqu’à ce qu’il ait poussé des dents, afin qu’il vous nourrisse lorsque vous aurez perdu les vôtres »[3]. A cette époque il avait été applaudi et semblait dire que la survie de l’Europe dépend de l’Afrique et qu’il faut que l’Europe comprenne le langage de l’intérêt commun… Mais moi, je me demande bien qui est la mère et qui est l’enfant ? Assurément on dira, dans la perspective de l’indépendance que la mère c’est l’Europe, l’Occident et l’enfant l’Afrique. C’est peut-être même dans cette optique que le père de la nation ivoirienne tenait son discours. Mais voici en réalité les faits : la mère, c’est l’Afrique et l’enfant l’occident. L’Afrique est le berceau de l’humanité et de la civilisation, l’écriture, le fer, les plus anciennes civilisations etc… y ont été soit inventés, soit découverts. Au primaire et au lycée, on nous l’a appris, l’Afrique est le berceau de l’humanité. Et pourtant, quand il s’agit du domaine factuel, on se dit être la fille. Le fait en est que notre enfant a tellement été nourri à notre sein, que toutes ses dents ayant poussé, il nous mort le sein et, nous maintenant dans la douleur, nous tient à sa merci de telle manière que nous en avons oublié la relation parent enfant et que les tendances ont été inversé et le rapport de pouvoirs renversé. Mais comment parvenir rétablir les vrais rapports ? autrement dit, en quoi se justifie l’urgence de l’authenticité africaine ?

Je répondrai (comme tout bon africain) par une question, que fait une mère quand son bébé lui mord le bout du sein (mdr, les sensibles s’abstenir) ??? Deux choses : un cri de douleur et / ou une bonne tape… Désolé, mais une tape, c’est un acte reflexe. Une piqûre de moustique (pour ceux qui ont déjà une ce plaisir loooool) et inconsciemment la main tape violement le lieu de la piqûre pour chasser ou tuer le voleur… Bha c’est quasiment pareil. Si notre enfant nous mord le sein, ce sein qui l’a nourri et lui a permis d’avoir ses dents, bha il faut le taper. Symboliquement ça dit, qu’il faut lui donner une leçon, l’éduquer, lui montrer l’exemple à suivre. Digression : Bien-sûr les protecteurs des droits de la femme et de l’enfant se sentirons heurtés par mes propos, mais franchement un enfant qui a toutes ses dents et qui vous mord le bout des seins, d’abord ce n’est plus un enfant (puisque ses 32 dents sont bien au nombre), ensuite c’est un acte pleinement conscient et responsable. Faut donc lui faire comprendre comme ne coupe pas la main qui porte. Il faut montrer ce qu’il ne faut pas faire, ou plutôt ce qu’il faut faire.

Dans le contexte culturel mondial d’aujourd’hui dans lequel nous sommes invités à créer les Demains, l’urgence de la réaction africaine, la réaction de la mère est avérée. Premièrement, parce qu’en tant que mère, elle doit éduquer son enfant, qui en reste un jusqu’à sa mort, et deuxièmement parce que son sein tenu par les dents tranchantes de son enfant, elle doit réagir au risque de devoir perdre son sein et ne plus pouvoir allaiter un autre enfant. Rappelons-le, nous parlions bien plus tôt de Narcisse, du despotisme doux et de la raison instrumentale, mais aussi du rôle qu’y a joué la mort de Dieu et le désenchantement du monde. Mais nous avons aussi et surtout parlé de l’authenticité inauthentique qui vise à être authentique pour être comme les autres, et de l’authenticité authentique qui dit une authenticité libérée de tout conformisme et qui ne quête rien d’autre que le plein accomplissement de soi. Face à ces maux, il nous faut opter pour la deuxième catégorie de l’authenticité qui nous invite à rester nous-mêmes tout en nous mettant à jour de notre époque et non pas de nos ‘’adversaires’’.


Les réactions face à la reconnaissance de soi et de son histoire dans le contexte mondial contemporain sont multiples. Cheikh Anta Diop l’avait déjà prédit. Pour lui, certains diront que « fouiller dans les décombres du passé pour y trouver une civilisation africaine est une perte de temps devant l’urgence des problèmes de l’heure, une attitude pour le moins périmée »[4]. Ils sont les plus nombreux. Généralement des intellectuels, ils soutiennent que l’urgence n’est pas culturelle, historique, ontologique. Pour eux, en effet, la condition Cine qua non du salut de l’Afrique réside dans la réponse à l’urgence des problèmes de l’heure, c'est-à-dire en la réponse aux exigences du développement, la satisfaction des besoins physiologiques. Ceux-là, Cheikh Anta Diop les nomme les métropolites-scientistes-modernisants. Le retour aux origines n’est pas pour eux opportun, encore moins nécessaire. Les origines appartiennent au passé et elles ne sauraient libérer l’Afrique de quoi que ce soit. Si aliénation culturelle il y a, leur conception des choses disqualifie, dans la quête d’une solution à ce mal, les origines jugées « périmées » dans tous les cas. Il ne s’agit pas, pour eux, de chercher à combler la vacuité qui plane sur la conscience culturelle africaine. Ils pensent que ma réflexion actuelle est un blablabla inutile et théorique qui n’ajoute rien au changement de la situation africaine… Peut-être !!! ce que je sais, c’est d’abord que je ne sais rien, et, ensuite, que

« ‘‘modernisme’’ n’est pas synonyme de rupture avec les sources vives du passé. Au contraire, qui dit ‘‘modernisme’’ dit ‘‘intégration d’éléments nouveaux’’ pour se mettre au niveau des autres peuples, mais qui dit ‘‘intégration d’éléments nouveaux’’ suppose un milieu intégrant lequel est la société reposant sur un passé, non pas sur sa partie morte, mais sur la partie vivante et forte d’un passé suffisamment étudié pour que tout un peuple puisse s’y reconnaître»[5].

Autrement dit, le présent et le passé ne s’excluent pas. Bien au contraire, le premier s’inspire du dernier, non pas de sa partie triste, sombre et barbare (je le repète), mais de la partie glorieuse. Il est donc question de rester soi-même, ce qu’on a toujours été tout en intégrant de nouveaux éléments à notre soi qui demeure. Ainsi, se libérer de la domination culturelle des autres, c’est savoir ce qu’on est, et savoir ce qu’on est part de la connaissance de nos origines, de notre culture, de notre vraie histoire. En clair, l’urgence réside dans le recours à nos origines pour nous libérer de l’aliénation culturelle du peuple négro-africain par les occidentaux, mais aussi dans la production, aujourd’hui de régime et système politiques africains, qui prennent en compte les réalités africaines et qui promeuvent le bien-être africain, à l’africaine. Je sais que dans la perspective dégaoutique, il faut prendre avec beaucoup de recul tout ce qui nous tombe dessus, venant des blancs ou de nous-mêmes, ces concepts génériques qui nous sont brandis… prendre du recul et non tout suivre tels des moutons de panurge. S’assurer que ces choses riment avec notre être, qu’ils ne se désolidarisent ni de notre Hier, ni de notre aujourd’hui, encore moins de la création de nos Demains.





[2]  Deuxième Pharaon de la IVe dynastie, on l’appelle aussi le grand bâtisseur. Lire https://fr.wikipedia.org/wiki/Kh%C3%A9ops pour plus d’informations.
[4] Cheikh Anta Diop, Nations nègres et culture, Paris, Présence Africaine, 1979, p. 15.
[5] Ibid. p.16.

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