Tantôt belle, tantôt atrocement
laide, arrêtons-nous un instant sur le visage de la jeunesse africaine
contemporaine.
Dans mon dernier texte, j’ai
essayé d’amorcer une réflexion sur la variable jeune dans le développement de l’Afrique.
Une variable bien connue des politiciens aînés, mais malheureusement mal
utilisée et à des fins pas toujours catholiques. Dans ce texte-ci je veux
essayer de rentrer plus en profondeur dans mon diagnostic de la jeunesse
africaine contemporaine. Je vais faire l’effort d’être précis (ce n’est pas
très sûr en fait) et assez clair, mais bon, je vais essayer dis-je.
De l’autre côté, l’expression
‘’jeunesse africaine’’ ne se prononce pas sans certains clichés : violence,
pauvreté, migrant, mais aussi virilité, force, main d’œuvre, pour ne citer que
ceux-là. On a vite fait de juger et de dire que ce ne sont que des clichés, de
la stigmatisation tout comme on a toujours pensée que « l’émotion est
nègre comme la raison hellène ». On est bien d’accord que ces deux pensées
ne reçoivent pas tous les accords. Autrement dit, il y une part de vérité et
une part d’erreur dans ces dires. J’explique, c’est vrai que ces clichés sont
de la stigmatisation tout comme l’émotion est nègre comme la raison hellène.
Mais c’est aussi une erreur de penser que la jeunesse africaine n’est rien
d’autre, de bon, que telle que décrite par ces clichés, tout comme c’est vrai
de soutenir que la raison est nègre comme l’émotion hellène. En clair, tout
comme raison et émotion se mêlent pour fonder en essence l’homme, qu’il soit
noir ou grec, de cette même manière, le beau et le laid, l’utile et le
nuisible, la paix et la violence se mêlent en la jeunesse africaine pour la
définir ainsi comme jeunesse, comme toute jeunesse de l’espèce humaine.
Qu’on se comprenne bien, je ne
veux pas tenir un discours politique, mais je fais juste des analyses et
j’essaie de les fonder en raison. Cependant comme je suis humain, elles seront
nécessairement entachées d’émotions. La jeunesse africaine n’a pas de
différence physiologique et intellectuelle avec les autres jeunesses des autres
continents. Ce qui diffère ce sont les conditions dans lesquelles notre
jeunesse émerge, encore que cette variable n’est pas vraiment lourde dans la
balance. Certains affirment que le problème de la jeunesse africaine provient
d’une mauvaise gestion faite par les aînés, d’autres soutiennent que ce sont
les blancs, d’autres encore, et ce sont les moins éclairés et malheureusement
les plus nombreux, pensent qu’il s’agit d’une certaine malédiction de Noé, se
référant ainsi au texte biblique de la genèse. Moi je dis que le problème de la
jeunesse africaine vient d’elle-même, de sa capacité à vouloir ou non être
dynamique. On me rétorquera que la volonté ne lui manque pas et que les
conditions politiques contraignent, soit. Mais l’être vivant par essence est un
être qui s’adapte aux réalités de son milieu. Je suis bien d’accord que dans un
contexte de guerre permanent et de corruption, les choses ne sont plus les
mêmes. Mais généralement ce sont les jeunes qui prennent les armes, on me dira
qu’on les force, je veux bien le croire, mais la volonté humaine est par
essence liberté et choix délibéré. Je veux dire que quand on fait un fan club
ou un mouvement de soutien pour un leader politique au lieu que de le faire
pour la nation, il y a problème.
Nous jeunes africains avons
tendance à donner raison à Senghor quand il affirme que l’émotion est nègre. Je
le répète, personne ne libère personne. C’est le peuple, ensemble qui choisit
le destin de la Nation, de la République. Il est donc, en mon sens insensé de
prétendre soutenir les idéaux d’un individu ou d’un parti politique. Tout au
plus, on soutient les idéaux de la République tels que proposés par tel ou tel,
et dans ce cas, on ne dirait pas mouvement des jeunes pour tel ou tel mais tout
simplement mouvement des jeunes pour la nation, sans allusion à un quelconque
leitmotiv de parti politique. Le véritable pouvoir en démocratie est dans le
démos, le peuple, le vote en étant le canal d’expression. Bref, l’idée est de
dire que nous les jeunes sommes coupables de notre propre misère quand nous
donnons nos mains à couper et nos voix à éteindre à un individu et non à la
nation. Le véritable pouvoir est entre nos mains et dans nos voix. En tout cas
en démocratie c’est comme ça. Je ne veux pas faire l’apologie de la
juvénocratie, mais c’est vrai que la jeunesse à un pouvoir dont elle n’a pas
toujours conscience. Elle joue la candide quand à l’aveugle elle se confie en
des hommes politiques qui parfois eux aussi des jeunes, mais qui loin de
réaliser les promesses qu’ils font, se remplissent les poches.
Mais qu’est-ce qu’on veut, faut
bien remplacer l’argent qu’il nous donne pour aller convaincre les autres à
voter pour lui. Je me souviens que lors des dernières élections présidentielles
en Côte d’ivoire, certains membres de syndicat qui faisait en l’occurrence
office de directeur de campagne nous invitaient à des meetings pour ‘’acheter’’
nos voix pour 5000 f CFA (environ 8 euros). Non seulement c’est ridicule, mais
cette démocratie à deux vitesses produit des élus qui se remplissent les
poches. Qu’est-ce qu’on veut ? Ce sont des hommes d’affaires. L’argent éjecté
doit retourner avec des bénéfices sans palier. Il faut donc revoir nos
manières, nos habitudes, nos valeurs si nous voulons déjà voir les choses s’améliorer.
C’est vrai que nous ne sommes pas aguerris à la pratique de la démocratie. Nous
sommes parfois complètement dépaysés. Peut-être c’est tout cela qu’on appelle
pauvrement « c’est les blancs » ou « c’est les politiciens ».
Mais On pourrait déjà commencer par être rigoureux avec nous-mêmes.
Vous vous dites sûrement que je
suis un beau parleur, soit, regardons la réalité en phase. Il suffit de voir l’activisme
de la jeunesse en période électorale et on comprendra. Peut-être qu’il faut
revoir le modèle démocratique africain, peut-être que le contexte de pauvreté
joue pour beaucoup dans la décadence de nos mœurs et dans notre goût pour le
gain facile. Mais rassurons-nous, nous ne sommes les seuls à avoir faim, ni à
être pauvres. Mais nous sommes les seuls à nous tourner en ridicules quand les
élections approchent. Nous devenons de vrais êtres d’émotions au détriment de
la raison. Et cela doit changer. De l’autre côté, même si les gens sont tout
aussi aliénés, vu la quantité d’intox qu’ils avalent par les médias et vu comme
on formate leur esprit à porter le choix du vote vers tel plutôt que tel, par
des sondages ridicules, des émissions de télé toutes préparées pour les déposséder
de leur esprit critique. Mais au moment du vote, il fait un choix objectif, sur
la base de son acceptation des idées de tel ou du refus de l’idéologie de l’autre.
C’est rarement que le jeune Français, par exemple, se dit : « vu la
somme d’argent qu’il m’a donnée, j’ai intérêt à ce qu’il gagne ». En
clair, le jeune de l’autre côté vote par devoir civique en tant que citoyen,
mais nous, nous votons aussi par devoir, mais par devoir de reconnaissance, en
tant que bénéficiaires. C’est un premier niveau de notre malaise. Un niveau d’autonomisation
et d’objectivité. Je ne dis pas liberté, parce que ce n’est pas ce qui est en
jeu. Il ne serait pas juste de dire que la jeunesse africaine manque de
liberté. Elle libre, mais préfère, ou plutôt choisit librement d’être
dépendante, esclave. En refusant ainsi à souffrir le minimum pour récolter un
plus grand bonheur, elle ferme la porte à son épanouissement et annihile son
véritable pourvoir. Le malaise aurait été encore plus profond si tous les
jeunes africains avaient les mains liées. Mais heureusement ce n’est pas le
cas.
Heureusement, notre jeunesse a
commencé à se réveiller. En dehors de cette mine moche, elle réussit à afficher
une bonne mine qui donne plutôt de l’espoir. Avec l’arrivée des Techniques de l’information
et de la communication il y une explosion de la liberté d’expression. Les jeunes
les plus éclairés, ceux qui ont fait de certaines études, arrivent, par ces
moyens, à éveiller la conscience de leurs paires, ils arrivent à transcender
les frontières ethniques, tribales, nationales et même continentales pour
transmettre aux autres jeunes l’éveil de conscience nécessaire pour un
changement de mentalité, de comportement et de situation. Ces jeunes-là aussi savent
le véritable danger inhérent à la démocratie telle qu’appliquée par nos leaders,
la nécessité de rester soi-même, le besoin pour la jeunesse africaine d’avoir
un véritable leader qui la mette en adéquation avec elle-même, son histoire et
avec son rôle véritable pour la communauté. Plusieurs plateformes ont été créées
pour favoriser le partage d’expérience, le parrainage entre des jeunes leaders
d’ici et d’ailleurs pour multiplier les bonnes œuvres. Ce sont des initiatives
à encourager. C’est bien ce visage de la jeunesse africaine que nous voulons
voir luire davantage.
Du reste, il faut espérer que
notre grand dédain de l’injustice et la honte que nous font vivre parfois les
ainés ne se mélangent et se transforment en une haine inconditionnelle et radicale des anciens et
plus loin tout ce qui est ancien, voir traditionnel. En effet, c’est ce qui donne
à notre jeunesse sa touche exceptionnelle et son véritable charme. Cette tendance
à lutter pour le changement sans nier les valeurs culturelles traditionnelles
et sans être une génération de la révolte et de la haine. C’est le visage qu’affichent
certaines jeunesses de certains continents qui dans la haine de la gestion
politique à finir par nourrir une haine pour les personnes d’un certain âge
(avancé) et partant tout ce qui est traditionnel, la religion, les habitudes et
pratiques du passé. Nous devons garder les pieds ancrés dans la tradition tout
en cherchant à faire régner notre beau visage sur le l’odieux et à l’imposer
sur le monde entier comme la véritable identité de la jeunesse africaine. Une
jeunesse optimiste, à la fois moderne et traditionnelle et qui use des
inventions de la contemporanéité pour conjurer le sort de son retard technique
et politique dans le monde actuel.
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